03/09/2016

Les conteneurs maritimes propagent des organismes nuisibles et des maladies

La Convention internationale pour la protection des végétaux confrontée aux défis du commerce mondialisé : si les déversements d'hydrocarbures intéressent l'opinion publique et suscitent son inquiétude, les "déversements biologiques" pourtant plus dangereux à long terme, passent eux, plus inaperçus.

Un champignon exotique est responsable de l'extermination de milliards de châtaigniers américains au début du XXe siècle, transformant au passage le paysage et l'écosystème de manière radicale. Aujourd'hui, l'agrile du frêne – une autre maladie qui voyage vers de nouveaux habitats en empruntant les routes du commerce mondial – menace de faire la même chose avec un arbre utilisé depuis longtemps par les hommes pour fabriquer des manches d'outils, des guitares et du mobilier de bureau. Il est probable que le plus grave de tous les "déversements biologiques" a eu lieu lorsqu'un microorganisme eucaryote, semblable à un champignon et appelé Phytophthora infestans, a entrepris un voyage de l'Amérique jusqu'en Belgique. En l'espace de quelques mois, il a atteint l'Irlande, déclenchant un mildiou de la pomme de terre qui a provoqué une famine, de nombreux décès ainsi qu'un déplacement massif de la population. Et la liste continue : une espèce proche du crapaud géant très répandue en Australie, s'est récemment enfuie d'un conteneur transportant des marchandises vers Madagascar (haut-lieu de la biodiversité) et la capacité des femelles à pondre 40 000 œufs chaque année représente non seulement une menace pour les oiseaux et lémuriens locaux mais aussi pour l'habitat de nombreux animaux et végétaux. À Rome, les autorités municipales intensifient leur campagne annuelle contre le moustique tigre, une espèce envahissante arrivée en Albanie par bateau dans les années 1970. L'Aedes albopictus, connu pour ses morsures agressives, prolifère à présent en Italie et le réchauffement climatique rendra des pans entiers de l'Europe du Nord propices à la colonisation.

Dans un tel contexte, les pays du monde entier se sont donc réunis il y a six ans pour établir la Convention internationale pour la protection des végétaux afin d'empêcher le commerce international de contribuer à la propagation de ravageurs et maladies des plantes et afin de protéger les agriculteurs, les exploitants forestiers, la biodiversité, l'environnement et les consommateurs. "Les pertes de récolte et les frais de contrôle engendrés par les maladies exotiques pèsent énormément sur la production alimentaire, la production de fibre et la production fourragère", a indiqué Craig Fedchock, coordonnateur du secrétariat de la CIPV au sein de la FAO. "Tous ensemble, les mouches des fruits, les coléoptères, les champignons et parentés réduisent les rendements agricoles mondiaux de 20 à 40 %", a-t-il expliqué. Les espèces envahissantes arrivent dans de nouveaux habitats par divers moyens mais le transport maritime est le principal d'entre eux.

Aujourd'hui, le transport maritime est synonyme de conteneurs maritimes : chaque année près de 527 millions de voyages sont réalisés à l'aide de conteneurs maritimes. À elle seule, la Chine gère plus de 133 millions de conteneurs maritimes chaque année. Par exemple, l'analyse de 116 701 conteneurs maritimes vides arrivant en Nouvelle-Zélande ces cinq dernières années a montré qu'un sur dix était contaminé à l'extérieur, soit deux fois plus que le taux de contamination intérieure. "Les dégâts vont au bien au-delà des problèmes liés à l'agriculture et à la santé humaine. Les espèces envahissantes peuvent provoquer l'obstruction de voies navigables et la fermeture de centrales. Selon une étude, publiée dans l’Oxford Journals BioScience, les invasions biologiques entraînent des dégâts estimés à près de 5 % de l'activité économique mondiale annuelle, soit l'équivalent d'environ dix années de catastrophes naturelles. Si l‘on ajoute à cela les répercussions qui sont plus dures à mesurer, on peut doubler la mise", a précisé M. Brockerhoff. Aujourd'hui, près de 90 % du commerce mondial se fait par voie maritime, avec une large panoplie de différentes logistiques, et en se basant sur une méthode d'inspection plutôt vague. 

FAO